La première mention qu'on ait du vocable Perche est dans la chronique de Grégoire de Tours (Histoire ecclésiastique des Francs - fin du VIe s.) : Saltus perticus. Le sens précis de saltus est "région montueuse et boisée... retraite de bêtes fauves" (Dict. latin-français de Riemann et Goelzer). Si le nom de forêt du Perche s'est maintenu au Nord de la région, c'est peut-être qu'il partit de cet endroit précis à la de la monarchie.
C'était en tout cas, un pays plus boisé qu'aujourd'hui surtout il était bordé d'une ceinture à peu près continue, principalement sur sa frange Ouest, mais il n'était pas que forêt. On a trouvé à peu près partout des vestiges d'une occupation préhistorique. On a découvert çà et là, y compris dans des champs qui venaient d'être labourés, des silex taillés. Ce qui se voit le mieux, les monuments mégalithiques dolmens ou menhirs ne sont plus tous là ; 1'un des disparus existe encore dans le nom d'une commune, Saint-Jean-Pierre-Fixte ; mais combien d'autres ont sombré sans laisser de traces.
Les Gaulois sont arrivés probablement vers le VIe s. avant Jésus-Christ. Ils ont laissé plusieurs noms de lieux, comme Condé (confluent) ou Bellême (lieu peut-être consacré à Belisama, déesse de la lumière). Les évêchés se sont installés presque toujours sur des surfaces qui relevaient d'une même " cité" gauloise - le mot de civitas employé par César ne désigne pas une ville, mais un groupement de populations qui avaient entre elles un lien religieux, juridique et militaire. Il semblerait bien en ce cas que déjà le Perche était disloqué entre ses voisins Carnutes (Chartres), Durocasses (Dreux) et Esuviens (Séez). En plein milieu du Perche, Feings est un mot qui dans toutes les parties de la France, désigne une limite importante entre Cités.
Les Gaulois avaient un système social de grande propriété agricole où un noble (terme de César) avait sous sa dépendance de petits cultivateurs. Sous l'Empire, les nobles ont latinisé leur nom, ont ajouté le suffixe iacum pour indiquer les terres possédées. Ce iacum est devenu, dans cette région é ou ai, y ou i, à la suite du nom déformé. Ainsi Sérigny est le domaine d'un Serenus. Les limites des communes de la Révolution - anciennes paroisses - sont presque partout les mêmes que celles des villae. Villa, employé restrictivement de nos jours, voulait dire tout le domaine, ce qui entraîne aussi les noms des communes en "ville" (Bivilliers, Villevillon, Barville, Marchainville, ou Villiers). Naturellement, les noms antiques sont souvent effacés par de plus récents, particulièrement ceux de saints.
On a trouvé, de çi de là, des restes de demeures somptueuses ; la plus belle mosaïque, au musée percheron de Mortagne, vient de la Simonnerie, en Villiers-sous-Mortagne. Mont-Cacune, en Sainte-Ceronne, était une petite ville. Les voies romaines, qui rendierent le Perche plus pénétrable, ont laissé des traces importantes tantôt une route actuelle est sur leur tracé, ailleurs un chemin d'exploitation agricole, ou même une limite de commune plus rectiligne qu'il n'est usuel, car la voie avait été un bornage indiscutable.
On ne peut pas tracer un historique, même approximatif, des invasions : celle qui détruisit Mont-Cacune en 285 n'était qu'un avant-goût, et ne laissa aucun peuplement germanique après cette alerte, toutes les villes importantes s'enfermèrent dans des remparts aucune dans le Perche. Pas tellement loin de chez nous, Jublains capital des Aulerces-Diablintes, a encore les siens, en terre - mais ne fut plus une ville digne par la suite de fixer un évêque -, au contraire la ville de Cénomans, dont le nom s'est transformé en Le Mans, bien ceinte de murs en pierres, encore existants aujourd'hui, est le siège épiscopal pour tout le Maine. Dans l'Ouest de la France, aucun royaume germanique ne s'installa après la grande invasion de 406 et le lien théorique avec Rome se maintenait sous la protection de Syagrius ; la victoire de Clovis sur ce dernier à Soissons en 486 amena la domination franque.
Le Perche avait déjà été christianisé par la propagande de missionnaires, dont beaucoup étaient issus de Tours (d'où la vénération, si généralisée, à Saint-Martin, dans nos paroisses). Quelques villages fixent le nom de ces hommes dont quelques uns sont entrés dans la cohorte de saints : Langis, Bhomer, Ulphace, entre d'autres.
D'après la toponymie, il ne semble pas que les guerriers francs aient reçu beaucoup de villages dans la région, sans doute assez mal famée, du Saltus perticus. On rattache généralement une possession mérovingienne au rnot "court", soit initial, entier (Courthioust) ou abrégé (Courcerault), ou final (comme Nonancourt), il en existe un certain nombre dans le Comté. A vrai dire, les résidus linguistiques sont un indice, pas une preuve. De toute manière, la masse des habitants a continué sans grands changements, ni techniques, ni sociaux, ses activités surtout rurales.
C'est, trois siècles plus tard, que surviennent ces Danois que nous appelons Normands, détruisant les monastères (comme celui de Corbion, devenu Moutiers-au Perche, à ne pas confondre avec Corbon), pillant les récoltes, provoquant en beaucoup de lieux un vide d'habitants.
L'armée carolingienne, destinée à des actions offensives, était inefficace contre des bandes de pillards très mobiles. La défense s'organisa sur place, à l'abri de retranchements de palissades et de terre. Du souverain, qui ne protégeait plus personne, le pouvoir réel passa aux chefs locaux les plus efficaces, eux-mêmes respectant une certaine subordination à l'égard des descendants des Comtes carolingiens qui s'arrogeaient un droit héréditaire. C'est alors qu'on trouve un Comté de Corbon, peut-être résultant d'un démembrement du Comté de Hiémois (Exmes étant alors plus important que Séez).
Le Comté du Corbonnais eut sa meilleure position défensive à Mortagne. Notons également qu'en 853, le seul soldat d'envergure du moment, Robert-le-Fort, reçut de Charles-le-Chauve la charge de missus pour les Comtés du Maine, d'Anjou, de Tours, de Corbon et de Séez, puis en 866, de ducatus Francorum pour les pays d'entre Loire et Seine.